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Appel : Bibliothèque des lieux uniques

collection morel - photo Philppe Lebruman

Il existe des lieux spéciaux, uniques, qui offrent des expériences esthétiques et sensibles particulières. Dans ces espaces, nous nous projetons : par effet de réflexion, une poétique s’opère.

Ils peuvent être des jardins, des recoins, des passages, des architectures, des paysages comme des territoires. Ils n’existent parfois que dans l’imaginaire et la fiction, ou ne sont connus que d’un tout petit nombre.

Ces lieux résonnent : mis en circuit avec notre imaginaire, ils oeuvrent et provoquent l’intuition, offrant de nouvelles alvéoles d’expérimentation.

Ces lieux, ainsi que les espaces et les dynamiques d’individuation qu’ils ouvrent, sont les objets de la Collection Morel, une proposition sur les lieux, l’expérience sensible des lieux et l’espace de la pensée qui aura lieu à PointCulture Bruxelles, au mois de mai 2014.

Dans ce cadre, nous proposerons notamment une Bibliothèque des lieux uniques qui rassemblera des témoignages d’expériences de lieux. Les témoignages devront répondre à ces deux questions : pourquoi ce lieu est-il unique ? Que s’est-il passé ?

Les participations doivent être sur format A4 recto simple, format portrait, et être accompagnées d’un titre. Elles peuvent comporter des images, comme être sur plusieurs feuillets, manuscrits ou tapuscrits, envoyés par messagerie ou par courrier. Elles doivent idéalement nous parvenir avant le 30 avril 2014, mais les dépôts resteront possibles après.

Collection Morel – contact@collection-morel.com
Association Disco-Babel, 24 avenue du Château, F-94300 Vincennes
Photo : Philippe Lebruman / Collection Morel

Collection Morel est un projet de Studio Walter

Les habitantes

Depuis quelques semaines, les pièces de notre maison ont été bien calmes. Villa Morel va revenir doucement en activité avec la collaboration, désormais, de deux nouvelles habitantes : Emeline Ancel-Pirouelle et Laura Deniau. La petite équipée continuera sa chasse aux lieux et aux espaces autres, qu’ils soient d’écart, d’illusion ou de projection, réels ou imaginaires, et partagera ses découvertes. Nous vous retrouvons bientôt ! Avec des baisers – VM

Meilleurs voeux

Je suis une maison

Je suis la maison, le lieu, semble-t-il d’un petit garçon. Peut-être dans un mois, je serai celle, celui, d’une petite fille. Quelqu’un m’habite, je le porte en moi, et nous en avons encore pour quelques mois.

Villa Morel, maison de lieux et d’espaces autres

Villa Morel a procédé à quelques petits aménagements et sera désormais consacré aux architectures, aux lieux et aux espaces autres, qu’ils soient d’illusion, d’écart ou de projection, réels ou imaginaires.

Ce site devient, pour l’occasion, un carnet de notes et de liens en soutien de travaux de recherche, d’écriture et d’édition. On travaille notamment à des recherches sur la montagne imaginaire de Berlin, The Berg.

Ah, et les commentaires marchent maintenant. Des baisers – VM

Villa Morel, fermée pour l’été


Villa Morel ferme son portail pour quelques semaines, pour se concentrer sur des recherches théoriques autour de quelques notions qui nous tiennent à cœur (l’écart, l’impact, la projection). On se baladera aussi à travers la France, en sandales, pour en parler avec certains d’entre vous. Avec des baisers, très bon été – Villa Morel

La broussaille, les fondations

Le jardin était en restanques, canevas d’espaces clairs et de zones d’ombres reliés par un jeu d’escaliers, de passages, de bosquets et de terre battue.

Deux grands platanes faisaient leur loi sur l’esplanade centrale ; plus à l’ombre, se trouvaient lavoirs condamnés entrouverts, des rampes, des théâtres de jour – alcôves de briques et de ciment – et des cathédrales de broussaille.

Mes parents avaient acheté la maison alors qu’ils étaient jeunes mariés, et que mon frère était en bas âge. Une dame s’était présentée à l’étude où travaillait mon père, elle souhaitait vendre cette ancienne bastide marseillaise, où quatre familles vivaient sans eau.

La maison se trouvait sur le domaine de ce que nous appelions Le château, une maison de maître dont, paraissait-il, un souterrain partant de nos caves pouvait accéder dans le secret.

L’espace était fermé au nord, où quelques rares fenestrons protégeaient du mistral, à l’ouest par un mur haut de plusieurs étages, et terriblement dangereux à l’est, ou une ligne de chemin de fer sans barrière avait place, et que nous nous empêchions de regarder.

Au sud, un chemin qui, depuis la route, n’appartenait qu’à la maison, tracé au couteau dans la nature archaïque et primitive qu’aucune lumière n’allumait la nuit.

Nous ne pouvions voir la mer au-delà des installations portuaires que depuis une terrasse en  triangle, sans repos et sans ombre.

Nous étions en ville, dans un espace inversé, entouré de murs invisibles, où rien n’était accessible et où tous les passages devaient se révéler.

Il m’a fallu du temps pour partir à la rencontre de cette topographie : j’ai grandi dans les fictions – mon terrain de jeu étaient les livres, la bibliothèque familiale, son tapis doux et épais, son Littré, le bras replié sous ma joue – lorsque je ne partais pas a l’exploration des caves où je tombais toujours sur une nouvelle curiosité : jambe de mannequin, boîtes de perles, anciens francs, outils inconnus.

J’étais jeune fille lorsque nous avons avons appris que ce lieu vécu que de nous, serait détruit avec son jardin quelques années après.

D’un jour à l’autre, je me suis retrouvée dehors, les bras nus au plus près des broussailles, a partir à la découverte ce qui allait devenir notre monde englouti, une parcelle de terrain où les rêves et le réel se confondent.

J’étais devenue la Faustine de ma propre invention de Morel, à la fois architecte de mes allées et de mes rues, et pleine passante d’un lieu qui ne le serait plus.

Ainsi a débuté ce qui allait devenir – je ne l’ai compris que bien plus tard – les fondations de cet atelier, et la constitution de ses collections.

L’élan sera constant, intrépide, m’emmenant dans bien plus d’aventures que je ne pouvais le prévoir. Aujourd’hui, je pousse le portail de la Villa Morel, inaugurant le lieu, la maison de mes écarts.

Aux jardins, aux passages, aux possibles ; aux aventures, aux tout proches, si précieux, mes inestimables compagnons.

Marseille / Berlin, mai 2011